
Jours blancs à Genève
Quand la bise fut venue
Année après année, la neige et les glaces se raréfient sur les berges du Léman. Pour ne pas oublier la magie de ces jours blancs, Stephan Torre témoigne, par l’image.
En février 1985, Genève s’engourdit sous une carapace de poudreuse. Un demi-mètre, tombé d’un coup, comme par magie. L’espace d’un moment, la plaine joue aux montagnes et la cité de Calvin, engourdie, découvre le plaisir du ski dans les rues. La neige du siècle, dit-on. Un souvenir cher au cœur de Stephan Torre. Ce Genevois pur souche, auteur de plusieurs recueils d’images consacrés à sa ville, n’a cessé, depuis, de guetter le retour du grand manteau blanc. Après 35 années de collecte, il a publié en 2020 Jour Blanc — échos d’une ville comme suspendue dans le temps. Une « madeleine de Proust », savoure-t-il, pour parler aussi aux générations futures d’hivers jadis enivrants, réduits à peau de chagrin par le réchauffement climatique.
Stephan Torre a la vocation de collectionner les instants — ici, juché sur son vélo, au dos duquel il parcourt inlassablement la ville ; ailleurs, aux quatre coins du monde, à la rencontre des hommes, des femmes et de leur quotidien. Les Bains des Pâquis, Genève entre ombre et lumière, La rade aux vents, tous ses ouvrages genevois parlent de l’éphémère, de sentiments, du temps qui passe, de visions souvent sculptées par la lumière.
Il y eut d’abord les cours de photo au collège, les pellicules 24x36, les économies pour acheter le premier agrandisseur entre amis, la lumière rouge de la chambre noire et l’odeur du révélateur dans son bac. Puis il y eut l’engouement pour les concerts et les grands groupes rock. Au fil des ans, la passion n’a fait que se développer. « La photographie, c’est un mode de vie, qui est en moi et l’a toujours été. Photographier, c’est fixer un moment, l’appréhender, le composer. C’est le regard sur ce qui nous entoure, sur tant de choses qui sont, qui font la vie sur notre planète. » Un témoignage. Une esthétique. Une quête de sens. Et, toujours, l’unicité d’une vision qui cherche à percer et franchir les arcanes du temps.
Et maintenant ? Maintenant, Stephan Torre s’embarque dans un nouveau projet. Genève en 4 saisons. Une nouvelle ode à sa ville, encore en quête de partenaires.