Objectif Verbier

helvet rencontre Simon Wiget

Texte
Claude Hervé-Bazin
Copyright
Raphaël Surmont | Sam Thomson
Parution
Hiver 2024-2025

Venu des sports outdoors, Simon Wiget a pris la tête de Verbier Tourisme il y a déjà cinq ans. L’occasion, pour helvet, de dresser un portrait méticuleux de son action, des atouts et des perspectives de la station — élue World’s Best Ski Resort en 2021 et 2022.

Simon Wiget, comment définiriez-vous la destination Verbier?
De la porte du Val de Bagnes (à 700 m d’altitude) aux neiges éternelles du Grand Combin (à 4’314 m), de la musique classique à l’e-bike, des après-ski mémorables de Verbier aux forêts sauvages du Haut Val, la destination et ses activités montrent énormément de contrastes et de diversité. Mais l’atout majeur, c’est ce fantastique terrain de jeu que nous offrent la topographie et la nature exceptionnelles de la région, l’altitude et l’étendue (410 km de pistes) du domaine des 4 Vallées, le mont Fort (3’300 m) et l’incontournable freeride, qui constituent une offre de ski unique. Verbier est une destination extrêmement dynamique qui innove constamment, assurant ainsi une attractivité été comme hiver.

Quels sont vos principaux marchés?
La Suisse (majoritairement le bassin lémanique), suivie de très près par l’Angleterre ! Viennent ensuite le Benelux, la France et les pays nordiques. Le marché américain (nord et Brésil) s’est bien développé ces dernières années, ainsi que l’Italie. Nous avons été impactés par le franc fort, mais nous avons la chance d’avoir une clientèle de provenances très diversifiées et plutôt haut de gamme, moins touchée par cette problématique. La pandémie a aussi eu de très fortes incidences, mais nos marchés initialement porteurs sont globalement revenus à leur niveau d’avant — avec cependant le marché suisse qui a progressé (un point positif).

Quelles proportions représentent aujourd’hui tourisme hivernal et estival?
L’hiver représente environ 65 % de nos nuitées, mais 80 % de nos revenus. Notre ambition est de devenir une destination qui vit dix mois par année et nous investissons énormément dans le développement de l’été, notamment via les événements et les infrastructures.

Comment avez-vous vu évoluer Verbier au cours des cinq dernières années?
De grandes tendances de fond déjà à l’œuvre avant la pandémie ont été renforcées, dont le retour à la nature, le besoin de grands espaces et la flexibilisation du travail. Ces aspects sont très positifs pour Verbier qui possède de nombreux atouts pour répondre à ces attentes, à commencer par un vaste territoire protégé (plus de la moitié de la commune !). De plus en plus de gens viennent travailler ici, soit en s’établissant, soit de manière régulière, soit occasionnellement. Le développement des écoles internationales et les nombreuses activités de la destination ont contribué à l’arrivée de plus en plus de familles et l’évolution du marché du travail nous a permis de compter sur un nombre grandissant de clients en-dehors des périodes de vacances scolaires. Plus de « creux » en janvier, comme jadis !

Que représente le tourisme dans l’économie locale?
Le tourisme constitue la base de l’économie du Val de Bagnes. De manière directe, il génère beaucoup d’activité et permet à de nombreux Bagnards de demeurer dans une vallée où la vie était très dure il y a moins d’un siècle. Il apporte aussi une contribution indirecte très importante, notamment dans le domaine de la construction. Si l’agriculture est florissante et offre des revenus plus importants qu’ailleurs, c’est parce que de nombreux produits locaux sont consommés par les touristes ; et si de nombreuses personnes s’installent à l’année, c’est aussi parce que les activités touristiques offrent une forte attractivité…

Quel bilan personnel tirez-vous après cinq années à la tête de Verbier Tourisme?
D’un point de vue personnel, je m’estime privilégié de pouvoir contribuer à faire évoluer une destination d’un tel dynamisme, qui a su concilier renommée mondiale et valeurs montagnardes. Mes premières missions étaient de créer une entité touristique unique (avec la mise en place de Verbier Tourisme SA en mai 2023) et de renforcer les liens avec et entre les acteurs du tourisme. Nous avons ainsi réussi à créer un outil de travail efficace et une très belle dynamique générale. C’est un travail collaboratif qui a nécessité l’implication de beaucoup de personnes. La réalisation du Master Plan Tourisme a constitué une étape très importante, qui nous a permis de définir une vision commune incarnant un objectif global.

Votre goût du sport a-t-il influencé votre approche?
C’est évident. Le sport est ici un des axes de développement principaux. Avoir été professionnel de snowboard, parapente et canyoning, et organisateur d’événements durant une dizaine d’années, m’a apporté une connaissance et une compréhension précieuses du terrain.

Quelle stratégie en matière de tourisme pour les années à venir? Sur quels chantiers la destination doit-elle encore travailler prioritairement?
La vision définie dans le Master Plan Tourisme (notamment via de nombreux ateliers participatifs, des sondages, des rencontres…) est de devenir « une référence des destinations de montagne durables 4 saisons ». C’est en soi un programme, qui implique d’être parmi les meilleurs, d’innover et de faire de la durabilité un fondement incontournable. Nous avons déjà la chance d’avoir une économie florissante et un socle social très développé et solide, nous pouvons donc accorder plus d’importance et de moyens au développement du pilier environnemental. Même si nous n’avons pas la meilleure image dans ce domaine, de nombreuses actions sont réalisées, que nous souhaitons valoriser. Verbier Tourisme est déjà labellisé « Swisstainable » (le label de durabilité de Suisse Tourisme) et nous avons pour objectif de devenir une « Destination Swisstainable ». Nous avons énormément d’autres chantiers en cours et à venir. Le développement de solutions pour offrir des hébergements abordables aux familles, aux jeunes et aux saisonniers est l’un des principaux.

Comment rebondir après avoir été sacrée à deux reprises «Meilleure station de ski du monde»?
Ne surtout pas se reposer sur ses lauriers et se rappeler que, malgré son importance et sa valeur, ce n’est qu’une distinction marketing. Nos concurrents se développent et innovent. Pour rester dans le peloton de tête (et si possible parmi les premiers), nous n’avons d’autre choix que de constamment remettre l’ouvrage sur le métier.

verbier.ch