Guillaume Cottancin

L’appétit vient en photographiant

Texte
Claude Hervé-Bazin
Copyright
Guillaume Cottancin
Parution
Hiver 2023-2024

La gastronomie est l’art d’utiliser la nourriture pour créer le bonheur, a écrit le philosophe et sociologue britannique Theodore Zeldin. Pour Guillaume Cottancin, le bonheur, c’est aussi de photographier les plus belles créations des chefs.

Tombé dans la marmite
C’est l’histoire d’un coup de chance. Un hasard, qui fait bien les choses. Étudiant en économie, Guillaume Cottancin travaille dans un restaurant de burgers artisanaux genevois. La communication l’intéresse. Le patron, séduit, le charge d’alimenter les réseaux de l’entreprise. Besoin d’images ? Le chef lui prête son appareil, ses lampes et hop, le voilà lancé dans une voie peu banale : photographe culinaire.

Il y a du pain sur la planche. À cet instant, Guillaume n’y connaît pas grand-chose, en photo. Il faut apprendre, lire, se documenter et, surtout, se coller l’œil à l’œilleton. Les assiettes défilent et les souvenirs d’enfance resurgissent. Ne voulait-il pas être cuisinier, dans ses jeunes années ? N’a-t-il pas souvent mis la main à la pâte, auprès de sa mère ? Barman, serveur, Guillaume dévore chaque jour des yeux les plats qui lui passent entre les mains, avant de passer de l’autre côté du miroir.

Quand c’est beau, c’est déjà bon !
Quelques années plus tard, l’autodidacte est devenu un photographe chevronné, reconnu dans son domaine et apprécié pour sa fidélité aux lieux et aux produits. Celui qui est fidèle dans les petites choses sera aussi fidèle dans les grandes, aime à rappeler Guillaume, citant les Évangiles. Sa démarche est on ne peut plus limpide : rester focalisé sur son travail, avec l’aide précieuse de son épouse.

Pas d’extravagances dans ses images, mais une recherche de pureté et de sobriété. « Au fur et à mesure que ma technique de lumière s’est affinée, j’ai enlevé des choses à mes photos. Pour revenir et rester à l’essentiel. L’assiette du chef. »

Photographier un plat n’est pas si simple. Le photographier avec créativité et en se renouvelant l’est encore moins. « J’aime beaucoup jouer avec la lumière et les textures du restaurant pour contextualiser le plat, précise le jeune homme. Je shoote surtout les assiettes hors de la table. » Sur le carrelage ? Pourquoi pas ! « C’est là qu’on s’amuse, que l’on peut être inventif et réaliser des photos uniques. Mais il ne s’agit pas pour autant d’imposer ma vision des choses. La photographie est un métier de partage et de service, tout comme la restauration. Je propose, le client dispose. Le but, c’est qu’il soit content, et moi satisfait de mon travail, en faisant concorder les visions pour arriver à un résultat unique et propre à l’établissement. »

« Gastronome ? Absolument ! »
Guillaume n’a pas que l’œil aiguisé, il a aussi un bon coup de fourchette. « Gastronome ? Absolument ! C’est le métier qui le veut et ma plus grande source de dépenses ! » Cerise sur le gâteau, d’un shooting à l’autre, le jeune photographe a souvent l’occasion de goûter aux créations qu’il vient de mettre en boîte. Les chefs protestent, certes… leurs plats ne sont pas faits pour être mangés froids ! Mais ils partagent aussi de bons conseils, à mettre en pratique à la maison.

« J’admire notamment les restaurants et hôtels qui prennent le temps de trouver des solutions innovantes pour diminuer les déchets alimentaires, et ceux qui encouragent les productions régionales, en sourçant localement des ingrédients comme le beurre, les légumes ou la viande. On produit de très belles viandes et poissons en Suisse ! Il s’agit de trouver le temps de les trouver (!) pour leur éviter une traversée de l’Atlantique… Bien sûr, ces efforts ont un coût et cela fait aussi partie de la responsabilité du client d’encourager ce type de pratique en y mettant le prix. »

guillaumecottancin.com