Melody Sky 2023

Une touche de féérie dans un monde de brutes

Texte
Claude Hervé-Bazin
Copyright
Melody Sky
Parution
Hiver 2023-2024

Les photos de Melody Sky sont partout à Verbier. En 20 ans, la jeune Écossaise s’y est taillée une place considérable grâce à ses images puissantes invoquant l’éternel alpin. D’Écosse en Suisse, via les quatre coins des océans, itinéraire (peu banal) d’une photographe-aventurière gâtée par la nature.

Sa première photo, elle l’a prise à l’âge de 4 ans. Son premier appareil ? À 9 ans. D’aussi loin qu’elle s’en souvienne, Melody Sky a aimé appuyer sur le déclencheur et collectionner les impressions. Mère passionnée de photographie, père passionné d’outdoors, sa voie d’aventurière de l’image était déjà presque tracée… Le reste n’est que logique et rebonds : des formations de biologie marine et de professeur de plongée, puis un job de guide sous la glace du lac de Tignes (F) et ce premier coup d’œil aux montagnes qui fait que, jamais plus, on ne peut en décrocher son regard. Ironique pour une fille partie de son Écosse natale en quête d’un climat plus clément… Quelques années plus tard, Melody débarque à Verbier, nouveau diplôme (australien!) en poche : la voici cinéaste spécialisée outdoors.

Aventurière et contemplative
Une femme cinéaste et photographe d’aventure ? Alors unique représentante de l’espèce, Melody est un oiseau rare. Plongeuse, grimpeuse, skieuse, cycliste alerte et à l’aise, qui saute d’un engin, d’un terrain à l’autre avec compétence, « sans être une athlète » précise-t-elle, mais « soucieuse de ne jamais ralentir la marche des pros », avec une priorité en tête : saisir ces clichés inoubliables qui convoqueront plus tard l’aventure. Sur le dos, 13 à 15 kilos de matériel. Dur d’être une femme dans ce milieu ? « Un avantage plutôt, qui contribue parfois à faire baisser un peu le niveau de testostérone », confie l’intéressée, sourire en coin. Et de préciser, sans tarder : « dans les aventures auxquelles j’ai participé, je n’ai jamais fait moins que ma juste part ».

« Les montagnes sont si vastes, si puissantes, si grandioses, si belles, si constamment remodelées par la météo et la lumière. J’aime le lever du jour et son coucher. J’aime les firmaments étoilés là-haut. Et le fait de s’éloigner du monde des hommes, de ressentir ma petitesse dans ce si vaste ensemble qui renforce le sentiment de vulnérabilité de nos existences. » Ces mots de Melody illustrent à merveille la teneur de ses images. Aucune morale, juste la volonté de montrer le beau pour donner envie et inspirer — façon ricochets sur l’eau ou effet papillon.

Le temps de la maturité
Pour Melody, bien plus qu’une destination, la photographie est un voyage. Son image favorite ? « Elle n’existe pas encore. » Pour la décrocher, les projets s’accumulent, récemment influencés par les contraintes globales et le souci de réduire son empreinte carbone. Moins d’hélicoptère. Moins d’avion. Plus de bateau. Plus de Suisse. L’équilibre n’est pas facile à trouver, mais tout arrêter n’aurait pas de sens. « Le monde serait très différent si chacun restait dans son coin ; confronter les points de vue et les modes de vie est essentiel. » Partager son expérience de manière constructive aussi. À travers des ateliers de formation à la photographie notamment. Au Kenya, auprès des riverains de la réserve du Masaï Mara, pour les aider à communiquer leur propre point de vue. À Verbier, également, à travers des camps de photo d’aventure en montagne (en partenariat avec Basecamp Events), en compagnie de scientifiques et d’experts (glaciologue, astronome…), histoire de mettre en perspective et mieux comprendre la nature tout autour.

Après 20 années passées à Verbier, dont une douzaine à temps complet, Melody est ici chez elle. « Cet été, à Londres, j’ai discuté en français avec des Parisiens qui, en m’entendant, m’ont demandé de quel coin de Suisse je venais. Apparemment, j’ai un accent d’ici, maintenant. J’en suis très fière ! »

melodysky.com